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antennerelais
18 mai 2009

Alain Badiou

 

 

badiou1

 

 

 

Sartre, un phare non remplacé

 


Sartre2aLongtemps Jean-Paul Sartre incarna en France une figure unique et centrale d'autorité morale, en même temps que d'ami du peuple (comme Victor Hugo en son temps).

Son prestige était immense, ses prises de parole, respectées, attendues tels des oracles. Le peuple savait que celui-là était viscéralement de son côté et du côté de la vérité et de la justice, qu'il n'y avait ni tromperie ni trahison à en attendre. Comme pour Hugo, l'enterrement de Sartre fut l'occasion d'un immense rassemblement populaire, le dernier du genre en France (des lycéens de 15 ans achetèrent du crêpe noir, et montèrent à la capitale se mêler au cortège).

La puissance de cette figure tutélaire, de cette autorité morale, est assez difficile à concevoir aujourd'hui pour ceux n'ayant pas connu, même très jeunes, les années 70. La mort de Sartre en 1980 constitua de fait un tournant dans la vie du pays, y laissant planer comme un "vide moral" - à tout le moins le manque d'un référent moral - que personne ne put ensuite venir combler (on sent bien que c'était là le rêve d'un BHL).

  • «les années où commencent ce que j'appelle la grande réaction, les années 80» (Alain Badiou)
   

   

Alain Badiou


Badiou_1bOr voici que quelques 30 ans plus tard, un philosophe prestigieux mais totalement inconnu du grand public, nommé Alain Badiou et âgé de 70 ans, rencontre l'adhésion populaire par un "petit livre d'intervention" (comme il dit) : De quoi Sarkozy est-il le nom ? (éditions lignes, janvier 2008).

Depuis, à chacune des ses trop rares interventions dans les médias, Alain Badiou suscite l'enthousiasme et la reconnaissance (on peut même parler de gratitude) : ainsi par sa tribune dans Le Monde l'été dernier, en réponse à BHL (qui l'avait pris à partie dans "l'affaire Siné") ; comme par tels autres propos dans Libération, ou Le Monde.

Alain Badiou se trouve, dans la droite ligne de Sartre, viscéralement du côté du peuple contre les intérêts des puissants :  il est assez clair qu'il ne trahira pas la vérité et l'honneur, pour une récompense, une place, une décoration.

Sa pénétration et sa vivacité d'esprit ; sa plume éblouissante (sans oublier son esprit facétieux) ; enfin depuis quelque temps sa reconnaissance populaire, spontanée : tout milite en faveur d'une plus grande implication de Alain Badiou dans le "chanp médiatique".

 

En conséquence nous appelons Alain Badiou à multiplier les prises de parole, les articles d'intervention, à l'exemple de Sartre (Badiou dispose d'un outil radical et nouveau, inconnu à Sartre en son temps : la facile et rapide diffusion de propos filmés, sous forme de petites vidéos, via le net). Depuis Sartre, nul sans doute n'a été autant que Alain Badiou en capacité de tenir ce poste d'élucidateur, de redresseur de torts, d'ami du peuple.

 

 

badiou_alain_a

 

 

 

Extraits

 

Quelques propos récents de Alain Badiou :

   

 

 

 

« Le monde capitaliste contemporain n'est pas dans ses ressorts intimes un monde civilisé. Pas du tout. C'est un monde violent, c'est un monde du contrôle, c'est un monde de l'oppression, c'est un monde de l'inégalité féroce, de l'inégalité assumée comme nécessité naturelle. »

(source)

« le capitalisme est l'organisation systématique de l'injustice et de l'inégalité, (...) d'une inégalité mondiale extraordinaire, et d'une inégalité interne, ici, qui ne fait que s'accroître »
(source)

« Il faut renverser le vieux verdict selon lequel nous serions dans "la fin des idéologies". Nous voyons très clairement aujourd'hui que cette prétendue fin n'a d'autre réalité que le mot d'ordre "sauvons les banques". »
(source)

« Une partie de l'action répressive de Sarkozy a été au-delà de ce que je pouvais imaginer. Je citerai notamment la rétention administrative concernant les malades mentaux, et les tentatives répétées de durcissement sans limite de la répression des mineurs. D'un autre côté, on peut évidemment être surpris de l'intervention systématique de l'Etat pour renflouer les banques, alors que la doctrine libérale voulait comprimer, presque sans mesure, les dépenses publiques. »
(source)

« Les "réformes" vont toutes dans le même sens : un Etat autoritaire et antipopulaire, que tout obstacle importune. Sarkozy procède à vive allure au démantèlement du système éducatif et, plus grave encore, du secteur hospitalier. (...) Ces derniers mois, la crise financière l’a pris à contre-pied. Il essaie de la gérer par des effets d’annonce, mais il ne fait rien d’autre que ce que les gouvernements font partout : sauver les banques avec des fonds publics. »
(source)

« Avec [Sarkozy], il s'agit vraiment de rompre toute la série de médiations qui existaient entre la population et l'Etat pour mettre ce dernier au service d'une classe de prédateurs. »

(source)

 

 

badiou7a

 

 

Le succès de librairie de Alain Badiou De quoi Sarkozy est-il le nom ? apparaît, un an et demie après sa sortie, prophétique sur bien des points.

Quelques extraits (insuffisants à rendre compte de la fulgurance de la pensée de Badiou, et surtout du cheminement en forme de maillage serré qui en semble une des caractéristiques principales) :


   

CIRCONSTANCES_b« Oui, chers amis, je flaire dans cette salle une odeur de dépression. Je pose alors que Sarkozy à lui seul ne saurait vous déprimer, quand même ! Donc, ce qui vous déprime, c'est ce dont Sarkozy est le nom. Voilà de quoi nous retenir : la venue de ce dont Sarkozy est le nom, vous la ressentez comme un coup que cette chose vous porte, la chose probablement immonde dont le petit Sarkozy est le serviteur.  » (p. 28)

« La fameuse escapade de Sarkozy sur un yacht de milliardaire - juste après les beuveries mondaines au Fouquet's le soir de la victoire -, n'est pas du tout une faute, un impair, comme on l'a parfois présentée. Certes, il est allé voir et remercier ses commanditaires, ses parrains, les gens de la haute finance dont il est le vassal. Mais il a surtout déclaré à tout le monde que ce serait désormais comme ça : il n'y a rien de mieux que le gain personnel, tout est désormais régi sous la règle du service des biens. (...) Sarkozy a symboliquement montré qu'il se servait en servant ceux qui ont des biens, que c'était pour ça qu'on l'avait élu, qu'une masse de nigauds l'avait élu. » (p. 53-54)

« Regardez à qui sont les journaux, y compris les télévisés les plus suivis. Ils appartiennent au roi du béton, au prince du produit de luxe, à l'empereur des avions de guerre, au magnat des magazines pipoles, au financier des eaux potables... En bref, à tous les gens qui, dans leurs yachts et leurs propriétés, prennent le petit Sarkozy, qui a bien réussi son coup, sur leurs genoux hospitaliers. » (p. 68)

« Les révolutionnaires français, qui sont républicains et non démocrates, appellent "corruption" l'asservissement de la puissance gouvernementale au cours des affaires. » (p. 120)

***

CIRCONSTANCES_c« Je dis que la subjectivité de masse qui porte Sarkozy au pouvoir, et soutient son action, trouve ses racines inconscientes, historico-nationales, dans le pétainisme. » (p. 103)

« (...) dans ce type de situation "pétainiste", la capitulation et la servilité se présentent comme invention, révolution et régénération. Il est tout à fait essentiel que Sarkozy ait fait campagne sur le motif de la rupture. (...) Le contenu est évidemment l'obéissance sans réserve aux exigences des potentats du capitalisme mondialisé. » (p. 105-106)

« (...) l'élection de Sarkozy reste quand même la marque d'un temps nouveau, une survenue immonde (...). » (p. 35)

***

CIRCONSTANCES_c« Sarkozy est déjà allé loin dans cette direction, n'hésitant pas à nous comparer très favorablement aux Africains. Il leur a fait savoir qu'ils étaient loin de nous valoir, et que, par conséquent, s'ils sont misérables chez eux, comme c'est de leur faute, ils doivent y rester. (...) Bien sûr, il nous faut des balayeurs, des éboueurs, des terrassiers... On les triera sur le volet, et ils sont priés de ne pas faire de tapage, ruminant, mal intégrés qu'ils sont, leur évidente infériorité. Comme dans le cas Pétain, il s'est trouvé une clique intellectuelle pour applaudir ces rodomontades racialistes (...). » (p. 113)

« (...) entre nous, il y a quand même beaucoup plus de raisons d'honorer un Malien qui fait la plonge dans un restaurant chinois, devenu - à force de participer, après son interminable travail, à des réunions et à des interventions - un intellectuel organique de la politique nouvelle, que d'honorer l'homme aux rats [Sarkozy]. (...) Nous rejetterons le verdict de Sarkozy et de ses rats, qui déclare du haut de son insignifiance réactionnaire que cet homme-là, le Malien de la plonge, est tout juste toléré, et doit remplir d'innombrables conditions pour pouvoir seulement rester là où il est. » (p. 59-60)

« La masse des ouvriers étrangers et de leurs enfants témoigne, dans nos vieux pays fatigués, de la jeunesse du monde, de son étendue, de son infinie variété. C'est avec eux que s'invente la politique à venir. Sans eux nous sombrerons dans la consommation nihiliste et l'ordre policier. » (p. 94)

***

CIRCONSTANCES_c« L'idée que les "usagers" sont systématiquement hostiles aux grèves est une contre-vérité notoire, une parmi toutes sortes de choses assénées comme des évidences par les politiciens et les médias dominants. C'est ainsi que la très longue grève des cheminots, en décembre 1995, a été soutenue dans tout le pays par des manifestations massives, plus massives même qu'en Mai 68. » (p. 43)

« Redevenons sérieux. Essayons d'interpréter ce que peut bien vouloir dire "Mai 68" aujourd'hui, pour un servant des indices boursiers, un ennemi confirmé des ouvriers sans papiers et des jeunes des quartiers populaires, un obsédé de l'ordre policier, un auteur prolifique de lois scélérates. » (p. 49)

« (...) je suis convaincu que Sarkozy, qui ne peut aller nulle part sans une garde rapprochée épaisse comme un mur, n'est pas très courageux. Comme tous ceux qui croient se tirer d'affaire en toutes circonstances par la corruption des adversaires et le tapage des effets d'annonce, Sarkozy redoute infiniment toute épreuve réelle. Si j'ai raison, ce dont Sarkozy a le plus peur, c'est que devienne visible sa propre peur. (...) la vertu politique principale, voire unique, de De Gaulle, était de ne jamais avoir peur. » (p. 31)

(...) cet épisode Sarkozy, qui tout de même n'est pas une des pages grandioses de l'histoire de France (...) » (p. 129)

 

 

Alain_Badiou_Ibo_Sipa

   
      

Alain Badiou vient de sortir un nouveau livre : L'hypothèse communiste

 

 

Alain Badiou (Ce Soir ou Jamais) (1-2) 09-04-2009
   

Alain Badiou (Ce Soir ou Jamais) (2-2) 09-04-2009

 

 

 

 

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Mise à jour 28/05/2009


Nouvel entretien vidéo de Alain Badiou, disponible ici :

   

La crise ? Le NPA ? Sarkozy ? Les « impasses » selon Badiou ("Rue89")

« Cette conception (en quelque sorte), brutale, autoritaire et sécuritaire du pouvoir, me paraît être restée l'axe dominant de la pratique politique de Sarkozy. »

   

   

 

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Mise à jour 29/06/2009

   

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Interview de Alain Badiou dans le Politis du 25/06/2009 :

« Sarkozy, le nom du pétainisme contemporain »

         

 

Extraits, sur Sarkozy :

« Sa force est là : il a réunifié la droite et l’extrême droite en s’appuyant sur quelque chose de diffus dans la société mais qui, à mon avis, est extrêmement puissant. Il s’agit de thématiques archiréactionnaires et sécuritaires : contre les malades mentaux, la jeunesse des banlieues, les étrangers, les ouvriers sans papiers, avec l’idée qu’on va tous leur mener la vie dure, renforcer les prisons et châtier les récidivistes. »

« C’est là le noyau dur du sarkozysme, et c’est ce que j’appelle pétainisme : une thématique de l’État qui, en fin de compte, tire sa puissance de ces thématiques les plus réactionnaires et les plus antipopulaires. Mais il y a aussi une attitude spécifique de Sarkozy en direction du monde ouvrier, que ses prédécesseurs n’avaient pas. Il s’est baladé dans les usines – il a même pris quelques risques parce que cela pouvait ne pas toujours bien se passer – et a loué la figure de l’ouvrier, celui qui se lève tôt, qui bosse. Venant d’un type comme lui, c’est du populisme réactionnaire dans toute son horreur. C’est ça qui m’avait fait dire qu’il était pétainiste, à partir de la nature du consensus un peu secret qui le porte. Dès que son pouvoir est en jeu, lors d’élections, par exemple, c’est cette artillerie antipopulaire archiréactionnaire, anti-étrangers, antijeunes, qu’il ressort systématiquement. »

 

Vous rappelez que Sarkozy a été d’abord élu sur la peur et, pour vous, un « État élu sur la peur est légitime à devenir terroriste ». Qu’entendez-vous par « terroriste » ?

« Pour moi, les État terroristes sont ceux qui s’engagent progressivement dans la voie d’un gouvernement par la loi répressive. Si on prend successivement les dernières lois sur les étrangers, qui font de la régularisation d’un étranger un acte arbitraire du pouvoir et des préfets, les lois concernant les jeunes du peuple qui, grosso modo, leur promettent la prison dès qu’ils sont trois en bas de l’escalier, et bien d’autres, je dis que le terrorisme est du côté du pouvoir. Ces lois vont rester et, appliquées strictement, rendent possible la surveillance policière et la  répression  pratiquement  sans limites contre les populations déclarées suspectes. On a bien là une "société de contrôle", comme aurait dit Deleuze. Cet ensemble législatif a pu jusqu’à présent fonctionner comme s’il était consensuel. »

« Je pense que Sarkozy a aussi ce côté antiparlementaire, au sens traditionnel du terme, qui est de gouverner en partie par la provocation. Il est constamment en train d’essayer de voir jusqu’où il peut aller. Je crois que beaucoup de choses immédiatement interprétées comme des bavures n’en sont pas : ce sont en fait des expérimentations assez contrôlées. »

« Je pense par ailleurs que des mots d’ordre mesurés de résistance personnelle et d’appel à la vigilance doivent aussi être diffusés. Un des aspects les plus néfastes de ce consensus du silence sur ces questions est en effet l’inertie : les gens qui détournent la tête. C’est un des aspects principaux de ce pétainisme dont je parlais : ce n’est pas tant une caractérisation du gouvernement de Sarkozy, mais surtout une caractérisation de l’opinion qui permet à Sarkozy d’être arrivé au pouvoir et de mener sa politique. Le pétainisme n’a jamais été principalement collaborateur au sens strict, il signifiait plutôt une attitude qui pourrait se résumer ainsi: "On va essayer de traverser la période le plus tranquillement possible." C’est d’ailleurs ce que Pétain avait promis. »

   
   

***

A lire aussi :

De quel réel cette crise est-elle le spectacle ?, par Alain Badiou ("Le Monde")

«Le volontarisme de Sarkozy, c’est d’abord l’oppression des plus faibles» ("Libération")

Alain Badiou : «Il faut que quelque chose arrive...» ("NouvelObs")

L’hypothèse communiste - interview d’Alain Badiou par Pierre Gaultier ("Le Grand Soir")

Le sarkozysme est-il un pétainisme transcendandental ?

La REACTION est à l'œuvre en France

Une heure avec Alain Badiou 15/09/09 ("Là-bas si j'y suis" - France Inter) - audio

   

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Commentaires
G
Alain Badiou n'est pas une conscience de la philosophie française. Sous des allures de papy rassurant, c'est le Béria, Jdanov, Pol pot d'une certaine pensée française à laquelle se raccroche une poignée de Supernaifs qui ne refléchissent que dans le cadre douillet de leur activité de fonctionnaires. Il n'y a rien de neuf avec Badiou ni même sens de la dérision. Voltaire l'aurait mis au rang de ses ennemis.
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T
Salut Antenne relais<br /> <br /> il attaque sec celui-là !
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A
Salut Rimbus, longue vie à Alain Badiou on peut dire !
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R
Super post antennerelais !<br /> moi aussi je suis fan de Badiou.
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