Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
antennerelais
24 juillet 2008

De la "dénonciation pour antisémitisme"

Après Claude Askolovitch et Philippe Val, Bernard-Henri Lévy (BHL) dégaine à son tour le missile suprême, à l'encontre de Siné mais aussi de "un antisarkozysme", puis enfin de Alain Badiou !

    

       

Un passage d'une récente tribune de BHL dans Le Monde, à propos de "l'affaire Siné", attire l'attention.


De quoi Siné est-il le nom ?, par Bernard-Henri Lévy (Le Monde)

BHL2« L'antisémitisme - comme, naturellement, le racisme - est un délit qui ne souffre ni circonstances atténuantes ni excuses. La chose devrait aller de soi. Hélas, ce n'est pas le cas. Car il y a une excuse au moins qui, depuis l'affaire Dreyfus, semble marcher à tous les coups et instaurer une sorte de clause de la haine la mieux autorisée.

C'est celle qui consiste à dire : non à l'antisémitisme, sauf s'il s'agit d'un grand bourgeois, officier supérieur de l'armée française. Ou : non à l'antisémitisme sauf si l'enjeu est un symbole du Grand Capital, un banquier juif, un ploutocrate, un Rothschild. Ou : sus à l'antisémitisme, cette peste des âges anciens que le progressisme a terrassé - sauf s'il peut se parer des habits neufs d'un antisarkozysme qui, lui non plus, ne fait pas de détail et ne recule devant rien pour l'emporter. »

 
Résumons :

1. L'antisémitisme est "terrassé", mais revit parfois, camouflé dans "un antisarkozysme"

2. "Un antisarkozysme" et l'antisémitisme présentent des caractéristiques communes (ils "ne font pas de détail et ne reculent devant rien pour l'emporter")

   
BHL se rend-il compte de ce qu'il écrit ?

Par ailleurs on se rappelle cette phrase de Claude Askolovitch (celui par qui le "scandale Siné" est arrivé) :

   
Asko3« L'idée selon laquelle Nicolas Sarkozy n'est pas un adversaire politique (avec qui on débat, on argumente, on contre-argumente), mais qu'il est un ennemi, un ennemi absolu, un ennemi de la République, qu'il est en train de détruire ce pays, et que donc il faut l'éradiquer : c'est une idée qui fait son chemin (...). »

(source)


Si le constat global de Askolovitch est juste, l'emploi du mot "éradiquer" (qui participe de la même posture que BHL) est évidemment irrecevable.

On se rappelle aussi que pendant la campagne présidentielle, le rapprochement entre "antisarkozysme" et antisémitisme avait déjà été osé, apparemment sans honte, et pas par Frédéric Lefebvre : mais par des personnes à priori respectables et sensées savoir manier les idées, tel Max Gallo.

 

 
"Dénonciation pour antisémitisme"

   
C'est un fait que depuis quelque temps en France l'accusation d'antisémitisme (infamie suprême) se trouve employée comme arme : après "l'antisarkozysme", Siné fut visé, victime apparemment d'un règlement de comptes interne à Charlie-Hebdo.

Il ne serait pas infondé d'avancer ici l'expression "dénonciation pour antisémitisme" (dénonciation calomnieuse en son principe - dans le cas contraire les lois sont là pour réprimer tout propos antisémite) : sorte de lointain et grotesque renversement de la délation antisémite qui sévissait sous l'Occupation, mais en l'occurence visant plutôt l'effet des dénonciations qui intervinrent à la Libération, lors de ce que l'on nomma l'épuration : "qu'on le tonde!"

Car l'objectif de ceux qui brandissent ces accusations d'antisémitisme calomnieuses (ainsi que l'ont bien senti, dans la toute récente "affaire Siné", la quasi totalité des commentateurs sur le net), est bien une "excommunication", un bannissement, le rejet hors de la civilisation, voire hors de l'Humanité véritable.

  • « En raison de la collaboration dont ont fait preuve les autorités françaises avec le régime nazi, durant la 2me guerre mondiale (1939-1945), et de leur contribution à la déportation des Juifs de France vers les camps de concentration, l’antisémitisme est un sujet sensible en France. Accusation infamante, elle condamne quiconque en est l’objet à une sorte d’ostracisme. » (René Naba)
  • « Siné n'est pas un ami, à peine un copain, mais je sais que cette accusation d'antisémitisme dont on l'accable n'est qu'un prétexte, je le vois, et je sais que c'est une accusation ignominieuse, destinée à tuer un homme moralement, socialement, professionnellement. » (Delfeil de Ton)
  • « "Antisémite" ! Ça vaut "Collabo" en 45, "Trotskyste" sous Staline, "Sorcière" sous l’Inquisition, "Pédophile" depuis l’affaire Dutroux. Ça salit bien, ça colle à la peau, ça tache éternellement, on ne s’en relève pas. » (Renaud Chenu)

   

Il y a quelques mois, même Pierre Bourdieu, ou plutôt son œuvre et sa mémoire, avaient été visés !


Après Bourdieu, à qui le tour ? (Libération)

   « Ces propos ne mériteraient pas qu'on les relève tant ils sont absurdes et ridicules. [...] l'usage de cette injure [...] est le symptôme de la vacuité du débat intellectuel et politique. Faute d'arguments, on injurie. Mais, à force de manier l'injure n'importe comment, ce sont les actes et les paroles réellement antisémites ou racistes que l'on banalise. »

 

 

Badiou dans le collimateur

   
Ce n'est pas fini
: en effet dans sa tribune du Monde BHL n'hésite pas à cibler, juste après "un antisarkozysme", l'excellent Alain Badiou ! Au mot "antisémitisme" déjà brandi il y a quelques mois à l'encontre de celui-ci (
à cause de son emploi du mot "rat"!), BHL en ajoute un autre : "fascisme" ! Comment peut-on tolérer une telle bouillie ? Mais attention : BHL invoque Sartre.

   
url« Ainsi parlait Alain Badiou quand, dans un livre récent, De quoi Sarkozy est-il le nom?, il s'autorisait de sa juste lutte contre l'"immonde" pour réintroduire dans le lexique politique des métaphores zoologiques ("les rats"... "l'homme aux rats"...) dont le Sartre de la préface aux Damnés de la terre avait pourtant démontré, sans appel, qu'elles sont toujours la marque du fascisme. » (BHL)

   
La préface de Sartre date de 1961. On ne sait quel était le ressenti exact il y a 47 ans, vis à vis de ces expressions "aux rats". En 2008, elles feraient plutôt penser à ceci : "nervi fasciste", "extrême-droite", etc.

Par ailleurs, il aurait été plus élégant, et plus sérieux, de la part de BHL, de donner une citation précise de la préface de Sartre. Heureusement celle-ci est disponible sur internet (qui en dix ans a "détricoté le travail fragile de deux siècles", dixit Philippe Val) :


Les damnés de la terre (Frantz Fanon, 1961) - Préface à l'édition de 1961 par Jean-Paul Sartre

 
Il se trouve que dans cette préface de Sartre, on ne trouve ni le mot "rat", ni le mot "fascisme", ni les mots "métaphore" ou "zoologique", ni rien directement en rapport avec ce qu'avance BHL.

« le Sartre de la préface aux Damnés de la terre avait pourtant démontré, sans appel, [que ces métaphores zoologiques] sont toujours la marque du fascisme » (BHL)

Peut-être est-ce ailleurs que Sartre - par ailleurs préfacier des Damnés de la terre - avait opéré cette "démonstration sans appel" ? Mais où ?

Ne serait-on pas plutôt là en présence d'une de ces "manipulations" dont BHL semble coutumier ?

 


BHL le faussaire


imposture_francaise« Avec Bernard-Henry Lévy, il faut toujours tout vérifier, même le plus anodin. [...] [Dans] un entretien publié par L'Express, du 10 au 16 janvier 2005, [...] l'écrivain, sommé de s'expliquer sur les libertés qu'il a l'habitude de prendre avec la réalité, revendique "une conception guerrière de la recherche de la vérité. Avec des stratégies, des lignes de front et de fuite, des ruses". Bref, une définition de la vérité qui ressemble comme deux gouttes d'eau à celle... du mensonge. »

« Le détail parfois dit l'homme entier. La petite imposture s'emboîte dans la plus grande qui elle-même en enferme une plus conséquente encore. »

(N. Beau & O. Toscer, Une imposture française, Les Arènes, 2006, p. 207)

 

Autre petite manipulation, pointée par Jean-Louis Loubet del Bayle (cité par BHL dans sa tribune), dans une lettre adressée au directeur du Monde :

« [...] j’ai eu la surprise de trouver mon nom [...] dans les propos suivants, sous la signature de M. Bernard-Henri Lévy : "c’est faire bon marché du courant dit précisément des "non-conformistes des années 30", et de l’énergie qu’il mit à fournir à l’antisémitisme de son temps ses armes et ses raisons (il convient, sur le sujet, de lire et relire le classique de Jean-Louis Loubet del Bayle…)".

[...] Ce [...] livre intitulé "Les non-conformistes des années 30. Une tentative de renouvellement de la pensée politique française" [...] ne contient AUCUN élément susceptible de justifier et de fonder l’affirmation de M. Bernard-Henry Lévy.

[...] Etant donné la notoriété de l’auteur de ce contresens, qui prétend donc utiliser à tort, à la fois, la réputation de l’ouvrage cité - qu’il qualifie lui-même de "classique" - et l’autorité qu’il me prête, je ne peux que vous demander la publication d’un rectificatif destiné à rétablir aux yeux de vos lecteurs une information exacte concernant le contenu de ce livre, son objet – les "non-conformistes des années 30" - et les analyses de son auteur. »

(source)

   

Autres manipulations au moyen de citations, opérées par BHL dans sa tribune du Monde, repérées ici :

La fabrique de l'antisémitisme ("Vive le goulag!")

      

A propos de BHL, les auteurs de Une imposture française concluaient cruellement, dans leur épilogue (p. 203) :

« Le théatre d'ombres béachélien joue la même pièce depuis trente ans sans que le masque ne soit jamais tombé, car l'homme épouse son époque. Philosophe enseigné dans aucune université, journaliste mêlant le vrai, le vraisemblable et le totalement faux, cinéaste de raccroc, écrivain sans vraie œuvre littéraire, il est l'icône d'une société des médias où la simple apparence pèse infiniment plus que le fond des choses. Ainsi Bernard-Henri Lévy est-il d'abord et surtout un brillant communicant, l'attaché de presse du seul produit qu'il sait vraiment vendre : "BHL". »

 

  • « Comment expliquer [...] que celui dont plusieurs livres d'auteurs différents ont mis à jour les multiples mensonges (de ses rencontres avec Massoud, à sa ceinture noire de judo) puisse encore être crédible ? Sans doute suis-je d'une naïveté infantile, mais je pensais qu'on ne pouvait à la fois être un menteur multirécidiviste et se prendre pour une figure morale. Comment quelqu'un ayant une pensée binaire (bien-mal, ami-ennemi, eux-nous) [peut-il] passer pour un intellectuel incontestable ? » (Pascal Boniface)

    

  • « Je crois qu'on le savait depuis le début que BHL c'était du toc et qu'on a laissé faire. L'idéologie française c'est aussi ça, parfois : conforter les intellectuels même quand ils barbotent dans l'approximation et l'erreur. »

(Bernard Kouchner, interview à Actuel, mai 1987, cité in Une imposture française, p. 152)

   

Jacques Bouveresse, professeur au Collège de France, a réagi ainsi à ces propos de Kouchner (Nouveaux Regards, septembre 2006) :

« J’ai trouvé ces propos effarants. Cela revient en gros à dire que, à tout prendre, mieux vaut passer pour des cyniques que pour des gogos. Les politiciens n’ont tenu aucun compte de ce qu’ont dit des gens sérieux et informés (comme par exemple Pierre Vidal-Naquet) à propos de certains des livres de BHL. On n’est arrivé à rien, et en partie à cause de l’attitude du monde politique qui se prosterne devant la célébrité, alors qu’il ignore totalement les représentants de l’université lorsqu’ils essaient de dire « non ». Contre ce genre de chose, les arguments ne pèsent à peu près rien. »

 

  • « L'ignorance de BHL et sa malhonnêteté intellectuelle sont proprement insondables »

(Pierre Vidal-Naquet, cité in Une imposture française, p. 149)

   

   

L'affaire Siné

      
Le texte de Siné :

« Jean Sarkozy, digne fils de son paternel et déjà conseiller général de l'UMP, est sorti presque sous les applaudissements de son procès en correctionnelle pour délit de fuite en scooter. Le Parquet a même demandé sa relaxe ! Il faut dire que le plaignant est arabe ! Ce n'est pas tout : il vient de déclarer vouloir se convertir au judaïsme avant d'épouser sa fiancée, juive, et héritière des fondateurs de Darty. Il fera du chemin dans la vie, ce petit ! »

(Siné, Charlie-Hebdo, 02/07/2008)

   
Sur ce texte de Siné, l'avant-dernier paragraphe de la tribune de BHL est un chef-d'œuvre de suffisance et d'aveuglement mêlés. Il est évident que le texte de Siné se plaçait principalement dans le registre de l'indignation (devant l'ambition voire l'arrivisme du fils Sarkozy - mariage d'argent avec apparemment conversion religieuse comme passage obligé), et non de l'humour... Qui cela pouvait-il faire rire ?

   
BHL3« Allons, Siné. Tu as encore le choix. Ou bien la répétition, le stéréotype, le même éternel retour du même humour de cabaret qui ne te fait, j'en suis sûr, plus rire toi-même - mécanique plaquée sur du vivant, ignominie couplée avec du cliché, gâtisme assuré. Ou bien changer de disque, inventer, te libérer et faire de ton humour l'aventure d'une liberté retrouvée et ajustée aux libertés du jour - jeunesse à volonté, talent, modernité. » (BHL)

   
Après s'être ainsi égaré (prendre un coup de gueule pour une blague débile !), BHL peut-il sérieusement
être écouté lorsqu'il décrète que le texte de Siné présente un caractère "antisémite" ? Mais on sent bien que sa tribune du Monde est avant tout posture, calcul.


Les derniers mots de l'article de BHL sont néanmoins d'une justesse parfaite :

BHL« Je ne pense pas qu'on en ait "trop fait" sur cette affaire Siné. Aussi minuscule qu'elle semble, c'est une de ces "sécrétions du temps" dont Michel Foucault disait qu'elles n'ont pas leur pareil pour refléter, condenser, télescoper, l'esprit et le malaise d'une époque. »

   
A ceci près que pour BHL, "l'affaire Siné" serait révélatrice d'un antisémitisme sensé se glisser partout ("s'insinuer partout", serait-il plus juste d'écrire).

Pour d'autres (ainsi que l'exprime de manière très claire, en marge des articles de presse publiés sur le net, la quasi totalité des commentaires - mais ce n'est jamais là que ce que "ânonne l'opinion", pour reprendre l'expression de BHL dans son article), "l'affaire Siné" est avant tout indignation devant une calomnie (l'accusation d'antisémitisme portée contre le texte de Siné) ; et accessoirement, révélatrice de cette imposture répétée qui consiste, pour s'en débarrasser, à accuser n'importe qui - ou quoi - d'antisémitisme (l'antisarkozysme, Bourdieu, Badiou, Siné, parmi les exemples les plus récents). "L'affaire Siné" est ce qui aura fait déborder le vase

 

  • « Mais la rescapée que je suis ne supporte plus tout ce ramdam chaque fois qu'on écrase un cor au pied juif. Je parle bien de cor au pied. Tout cela est malsain, contre productif, et pire, alimente un antisémitisme véritable. Quelque chose de malsain et qui risque d'exploser un jour d'une manière qu'on n'imagine pas. » (Deborah)
  • « Ce serait risible si ça ne donnait pas de quoi faire fantasmer les adeptes de "complots juif" et autres vrais antisémites, racistes et timbrés de toute sorte » (Altarius)
  • « Siné antisémite! Ce serait une bonne blague si cela ne relevait pas d'une chasse aux sorcières, initiée par des écrivaillons embourgeoisés prêts à toutes les forfaitures pour être du bon côté du manche médiatique. [...] Oui! A cette insulte fielleuse, ma part de juif se révolte, partagée entre le dégoût et le rire. Quels nabots du journalisme il faut être pour se livrer à de telles bassesses, et quels flatteurs soumis pour les soutenir ? Oui, de la même façon qu'il défend les "underdogs" toutes couleurs confondues, Siné est le grand ami des juifs, Siné est notre ami, le meilleur de nos amis, l'ami de ce que nous avons de meilleur en nous ! Siné,à te lire depuis si longtemps, à te fréquenter, j'en témoigne et suis prêt à le faire jusqu'à ce que tes lamentables détracteurs soient confondus. » (Mark Held)
  • « Certes, pour bon nombre de personnes qui réfléchissent, l’avis de BHL n’a aucune espèce d’importance. [...] le dernier épisode de son "engagement intellectuel" contre le dessinateur Siné a fini de le situer du côté où finit la pensée et commencent les aboiements des serre files de tous les temps et tous les camps. » (Jean-Luc Mélenchon)

 

 

Un précédent dans Le Point

 

En mars dernier, BHL avançait les mêmes idées que dans sa tribune du Monde, mais de manière plus radicale.

 

Le bloc-notes de Bernard-Henri Lévy - Sur un certain antisarkozysme... ("Le Point" 27/03/2008)

    arton2819« [...] ces sites antisémites qui se déchaînaient, pendant la campagne, sur l'air du "Tout sauf Sarkozy" »

« le livre [...] où le philosophe Alain Badiou, prétendant se réclamer de Freud (pauvre Freud !), n'appelle plus le président par son nom mais "l'homme aux rats", juste "l'homme aux rats", comme dans les films de propagande qui passaient dans les cinémas sous l'Occupation. »

   
Le meilleur pour la fin :

      « Je pense à tels signes, minuscules sans doute, dérisoires, mais qui vont des attaques ad hominem (en particulier sur le physique) à un type d'agression que l'on ne s'était autorisé vis-à-vis d'aucun de ses prédécesseurs (l'affaire du SMS) en passant par "Les Guignols de l'info", qui lui collent maintenant (s'en sont-ils eux-mêmes avisés ?) l'accent des comédiens de "La vérité si je mens". Je mets tout cela bout à bout. Et finis par me dire qu'il y a là, qu'on le veuille ou non, quelque chose qui fait symptôme : non plus de quoi Sarkozy mais de quoi l'antisarkozysme est-il le nom ? »

   
A ce stade, il ne semblerait pas déraisonnable de s'interroger sur l'intégrité mentale de BHL. Cependant on peut reconnaître que dans sa tribune du Monde il a baissé d'un ton.

 

***

   
A noter que
Alain Badiou, dans un article de Libération, avait lui-même répondu en janvier dernier à cette invraisemblable accusation d'antisémitisme déjà portée à son encontre.

   
Badiou répond aux "tontons flingueurs" (Alain Badiou, Libération, 14/01/2008)

   
Badiou2_e« [...] un jour, on vous envoie des porte-flingues. Parce qu’on sait que vous êtes devenu le philosophe français vivant le plus traduit et le plus demandé, et de loin ? Parce que s’annonce le déclin des imposteurs qui depuis vingt ans représentent dans les médias la "philosophie" ? Parce qu’un de vos petits livres d’intervention, De quoi Sarkozy est-il le nom, consonne avec l’humeur belliqueuse d’une fraction du "grand public" ? L’avenir de l’histoire fera le tri des raisons.

Mais qu’est-ce qui tue quelqu’un, de nos jours, dans la guerre intellectuelle ? Parbleu ! L’accusation d’antisémitisme ! Voilà la bonne idée ! »

 

 

***

 

Mise à jour

 

boomerangLeft

 

Le temps que ce billet se termine, et Le Monde mettait en ligne la réponse de Badiou à l'article de BHL!


Tout antisarkozyste est-il un chien ?, par Alain Badiou ("Le Monde", 24/07/2008)

   
Copie intégrale (Le Monde ne laisse pas indéfiniment
en ligne ses articles) :

   
alain_badiou« Les ennemis de toute politique autre que celle qu'ils nomment très à tort "démocratie", vu qu'elle est, de notoriété publique, le pouvoir d'une maigre oligarchie de dirigeants d'entreprise, de détenteurs de capitaux, de politiciens consensuels et de stars médiatiques, ont inventé depuis quelques années un truc dont ils usent maintenant contre quiconque leur déplaît : insinuer qu'il est antisémite. J'ai l'honneur d'être flanqué de vrais professionnels de cette insinuation.

S'agissant de mon avant-dernier livre, De quoi Sarkozy est-il le nom?, qui a plu à pas mal de monde, et qu'il fallait de ce fait même stigmatiser le plus vite possible, il était dur d'y trouver, même en mentant comme un arracheur de dents, de quoi alimenter le truc de l'antisémitisme. Pas la moindre allusion au mot "juif". Eh bien, les professionnels de la délation, les sycophantes, en ont trouvé quand même ! M. Assouline a remarqué, sur son blog, que je traitais de "rats" les socialistes entrés au gouvernement Sarkozy, et, par voie de conséquence, Sarkozy lui-même, d'"homme aux rats".

Quelqu'un de très modérément cultivé sait aussitôt que j'entrelace ici, non sans une subtilité rhétorique qui mériterait des éloges, la métaphore des rats qui quittent le navire, la légende du joueur de flûte qui entraîne les rats hors de la ville, et le cas, décrit par Freud, de "l'homme aux rats" comme exemple type de l'obsession. M. Assouline est-il cultivé ? Il sait en tout cas où il veut en venir. Depuis la dernière guerre et les nazis (suivez mon regard), proclame-t-il, personne n'a plus traité qui que ce soit de rat. Par ailleurs, il y a des juifs dans la généalogie de Sarkozy. Donc… Vous voyez ? Hein ? Vous voyez bien ?

Le plus drôle est que le chef de file des intellectuels médiatiques commis à la Restauration, Bernard-Henri Lévy, saute sur l'occasion, sans citer du reste sa source, M. Assouline. Citons, nous, BHL (dans Le Monde du 22 juillet) : "Dans un livre récent, De quoi Sarkozy est-il le nom ?, Alain Badiou s'autorisait de sa juste lutte contre l'immonde pour réintroduire dans le lexique politique des métaphores zoologiques ( les rats … l'homme aux rats ) dont le Sartre de la préface aux Damnés de la terre avait pourtant démontré, sans appel, qu'elles sont toujours la marque du fascisme."

Alors là ! Sartre ! Tout du long de l'essai fondamental Les Communistes et la paix, écrit au début des années 1950 (Les Temps modernes, 1952), il appelle "rats" les anticommunistes. Il le fait certainement avec d'autant plus de bonne humeur qu'il a été lui-même traité de "hyène dactylographe", non par les fascistes, mais par ses alliés communistes. Le même Sartre avait du reste prononcé la sentence fameuse : "Tout anticommuniste est un chien." Comme quoi, bien après la guerre, les animaux étaient mis à contribution de toutes parts… Pendant la campagne électorale, Nicolas Sarkozy comme Ségolène Royal ont fait l'éloge de Tony Blair. Utilisant une comparaison chinoise, je les ai appelés des "blaireaux de la même colline". Blair, blaireaux… Que les délateurs prennent note : j'ai ajouté aux "métaphores zoologiques" l'ignominie des jeux de mots sur les noms propres. Aucun respect de la personne humaine.

Eh bien, finalement, je plaide coupable. J'utilise en effet sans remords les "métaphores zoologiques". Ce qui caractérise la politique, même si le capitalo-parlementarisme pousse sa domination jusqu'à vouloir nous le faire oublier, c'est qu'il y a des ennemis. Et pourquoi diable, si ce sont de vrais ennemis, me serait-il interdit de les injurier ? De les comparer à des vautours, à des chacals, à des butors, à des linottes sans tête, et même à des rats, à des vipères, lubriques ou pas, voire à des hyènes, dactylographes ou pas ? On ne peut pas toujours comparer les gens à des aigles, comme on l'a fait pour Bossuet, ni même à des bœufs, comme ce fut le cas pour le président du conseil Joseph Laniel, ou encore à des renards, comme c'était courant s'agissant de Mitterrand.

Et puis, mesdames, messieurs, un peu d'humour. A supposer que Ségolène Royal me fasse penser à une chèvre peinte et le premier ministre Fillon à une fouine endormie, ne croyez pas, quel que soit votre animal favori, qu'il faille grimper au plafond ! »

 

Lorsqu'un lecteur familier des grands auteurs aborde un livre de Alain Badiou, il se sent immédiatement en confiance, en même temps qu'une allégresse se diffuse en lui : ceci par le simple effet de l'excellence du style de l'auteur, chose si rare.

   

      

bhl_url_120

   

  

Mise à jour 25/07/2008

     

Antisémitisme : l’échec d’un chantage ("Le Monde Diplomatique")

   
Sans_titre2« Depuis le début des années 1990, on ne comptait plus les adversaires de l’impérialisme, du néolibéralisme, des médias dominants…, qualifiés d’antisémites, voire de "nazis" par quelque gardien de l’ordre social. Le prétexte pouvait être léger, inexistant même. Qu’importe : écrasé par la gravité de l’imputation, l’accusé devait aussitôt exciper de ses états de service antiracistes, évoquer la liste de ses amis et parents promptement transformés en cautions de moralité, autopsier un trait d’humour plus ou moins réussi.»

« (...) seul le tribunal de l’Inquisition et ses juges inamovibles (Alain Finkielkraut, Ivan Rioufol, Alexandre Adler, Philippe Val, Bernard-Henri Lévy) avaient la permission de manier l’irrespect, la provocation, de frôler (ou de franchir) la ligne jaune de la stigmatisation collective. Eux pouvaient justifier — au nom de Voltaire et du droit à la caricature — leurs dérapages sur, par exemple, la couleur des joueurs de l’équipe de France ou l’assimilation de l’islam au terrorisme. »

« (...) Edgar Morin, Pierre Péan et Philippe Cohen, Daniel Mermet, Hugo Chavez, Pascal Boniface, Jacques Bouveresse, Charles Enderlin, Pierre Bourdieu, José Bové… sans oublier Le Monde diplomatique, ont été tour à tour suspectés ou accusés d’antisémitisme. »

« (...) cette fois, l’affaire semble se retourner contre ses instigateurs. En marquant leur solidarité avec le dessinateur calomnié, des milliers de personnalités, d’intellectuels, de journalistes et d’anonymes ont signifié que ce manège devait cesser. »

  

  

BHL2_100

  

  

Mise à jour 26/07/2008

   

Article irresponsable et halluciné de Alexandre Adler (membre du "tribunal de l'Inquisition" dont parlait hier Le Monde Diplomatique) :


L'antisémitisme, ciment du vertige identitaire ("Le Figaro")

    

Passons sur sa façon d'accabler Siné, emplie de mauvaise foi, car ceci est au fond de pure forme : l'objectif de Adler dans cet article est surtout d'attirer l'attention sur ce qui semble constituer sa marotte (l'existence d'une sorte de "complot antisémite" irréfléchi, accessoirement "antisarkozyste").

   
Marotte

1. Sceptre surmonté d'une tête coiffée d'un capuchon bigarré et garni de grelots.

3. [Sens figuré] Idée fixe, manie. => dada, folie, manie.

(Le Petit Robert)

   
Mais, en lisant cet article, une horrible impression : comme si Adler créait réellement, lui-même, avec ses mots, ce qu'il s'efforce pourtant apparemment d'exorciser, et qui n'existait jusque là que dans son cerveau victime de surchauffe.

   

Adler« Qu'est-ce qui unit de part le monde un islamiste marocain, un communiste russe déçu, un pasteur africain-américain ségrégationniste à l'envers, un intellectuel anglais semi-aristocratique et antiaméricain… et un adversaire rabique du président Nicolas Sarkozy, qui voit en lui l'inacceptable promotion de l'étranger ? L'antisémitisme sert ici de ciment à un authentique vertige identitaire. » (Adler)

   
Il y a effectivement un vertige : mais créé par Adler lui-même, par l'inconséquence, l'irresponsabilité avec laquelle il mélange tout pour aboutir à une dangereuse bouillie, sur un sujet sensible comme l'antisémitisme, qui ne devrait être abordé que mezza voce. Mais Adler vocifère, en tous sens, agitant les grelots de sa marotte
...
   

« Mais revenons un instant sur la haine antisarkozyste : on aura beau rappeler que le président n'est ni juif par la religion ni même très majoritairement par l'origine [...] : qu'importe, [...] voici que les antisémites, comme un essaim de mouches, s'en prennent à sa personne, ou, le cas échéant, à celle de son fils. » (Adler)

 
Après de tels propos, un premier réflexe serait d'appeler au secours la phrase de Jules Lagneau : « c'est d'une sottise qui désarme l'indignation »(1). Hélas on est là dans quelque chose de sensiblement plus grave que la simple sottise... Car il est parfaitement exact qu'à hurler après les démons, ceux-ci finissent par réellement apparaître.

(1) Cité in Alain, Souvenirs concernant Jules Lagneau, Gallimard, 1925, p. 41.
 

Mais une lueur : peut-être Adler a-t-il écrit un texte parodique, pour rire ? Pour se moquer sans doute de cette ridicule accusation d'antisémitisme portée contre le texte de Siné ?

aadlerEn effet :

   

« Aujourd'hui, on voit en tout cas qui a la trempe d'un Zola, d'un général Picard : c'est Philippe Val. »

  

Et juste après, les derniers mots de l'article :
   

« Et qui a la bassesse de Drumont, de Maurras ou de Bernanos : ce sont les pétitionnaires semi-trotskistes en faveur de l'éternel stalinien Siné. »

   
Certes c'est amusant. On attend quand même confirmation de l'intention comique de Adler...

   

***
      

De quoi l'antisémitisme est-il le nom? ("Actualités de la Recherche en histoire visuelle")

« Derrière l'accusation d'antisémitisme, ce qui se cache est bien souvent un incontrôlable prurit antigauchiste. On le constate : d'Askolovitch, qui déclare les chroniques de Siné d'un "gauchisme imbécile", à Joffrin, qui vise les "bataillons quelque peu cacochymes de l’extrême gauche antisioniste", en passant par BHL, qui profite de l'affaire Charlie pour régler ses comptes avec Alain Badiou et l'"islamo-gauchisme", la rage des intellectuels médiatiques à débusquer la haine du juif s'abreuve à une source des plus politiques. [...] A force de mauvaise foi et d'aveuglement, l'anti-antisémitisme est devenu le nom d'une bien nauséabonde dérive, qui n'a plus rien de la vigilance éclairée, mais tout du règlement de comptes néo-conservateur.  »

  

  

BHL_120

  

   

Mise à jour 27/07/2008


Siné : Val fan culo ! (Renaud Chenu)

   
« [...] Siné n’a pas associé juif, pouvoir et réussite sociale. Il a suggéré une conversion à caractère supposée opportuniste de la part d’un garçon dont la récente geste politique a montré qu’il est brillant en la matière. Il ne l’a pas condamné, il l’a même félicité, avec un poil d’ironie, c’est de bonne guerre, c’est l’arme des Siné de tous les pays, l’ironie ! Dans cette phrase, Siné se fout que Mlle Darty soit de confession juive. (...) Tout cerveau normalement constitué a compris ça. Des fous dangereux comme Guy Bedos, Gisèle Halimi, Christophe Alévèque, Lefred Thouron et des milliers d’anonymes qui le soutiennent ont compris ça. »

« Ceux qui y voient de l’antisémitisme ont un vrai problème. [...] Soit ils sont paranos et dénichent l’antisémitisme là où il n’est pas, et dans ce cas on ne peut rien pour eux, juste regretter qu’ils aient tant de facilité à répandre la peur qui les ronge sur la place publique. Soit ils sont sciemment manipulateurs, et dans ce cas ils sont dangereux pour la démocratie, car ils entretiennent un climat médiatique où l’antisémitisme est maintenu à un niveau artificiellement haut, en tout cas plus élevé qu’il ne l’est réellement. [...] »

« [...] Utiliser l’antisémitisme, cet outil inflammable, pour salir un homme qu’on ne peut pas saquer... pour le mettre au banc... [...] Val [...] espérait que ça passerait, il avait dû parier que personne n’oserait soutenir un homme taché du sceau de l’infamie. Plantage, mec. »

 

  

aadler_100

  

 

Mise à jour 30/07/2008


"La phrase de Siné avait été prononcée par le président de la Licra!", par Delfeil de Ton


Tartuffes de tous bords, ne touchez pas a mon pote Siné ! ("Democratie & socialisme")

« Moins de 70 ans après la libération des camps d’extermination, l’accusation d’antisémitisme est certainement une des plus graves qui soient, car elle est liée à un des plus grands crimes de l’époque moderne. C’est bien pourquoi on ne doit l’utiliser a la légère. Encore moins l’instrumentaliser pour régler des comptes personnels ou politiques. »

 

Affaire Siné : «Val voit de l’antisémitisme subliminal» ("Libération")

« c’est une forme de terrorisme intellectuel que de considérer ce message comme faisant l’analogie entre judaïsme et goût de l’argent. [...] Philippe Val possède un épiderme à géométrie variable. Cela ne lui posait en effet aucun problème de faire le parallèle entre Mahomet et les poseurs de bombes. Et d’assimiler, par là-même, les musulmans aux terroristes. [...] dans l’affaire Siné, il n’y a pas d’outrage ou d’injure envers un groupe religieux dans son entier, la volonté de Val est d’aller au-delà de la loi. »


Le théorème de Joffrin, par Delfeil de Ton

« Aucun journal, en France, à ma connaissance, n'avait encore fait ça [avant Libération] : stopper net les réactions des internautes à un écrit de son directeur. »

 

Philippe Val devrait prendre de longues vacances... (Guy Birenbaum - "LePost")

 

Texte absolument remarquable signé Thierry Savatier, écrivain et historien :


Les dangers de “l’affaire Siné” ("Les mauvaises fréquentations")

   
« [...] Le fait de pouvoir substituer à "judaïsme" tout autre qualificatif religieux (bouddhiste, protestant, born-again, musulman, hindouiste, etc.) sans changer le sens de la phrase litigieuse rend la suspicion d’antisémitisme peu consistante. Par ailleurs, avoir vu dans ces lignes le raccourci – aussi stupide qu’odieux – "Juif = pouvoir et fortune" ou "il faut être Juif pour réussir dans la vie", n’est-ce pas avant tout avoir voulu l’y voir ? [...] »

« [...] A force de crier à l’antisémitisme à tout propos, ne court-on pas le risque, particulièrement dangereux, de décrédibiliser une juste cause, d’en banaliser la notion et de lasser une opinion qui restera sourde si un jour survient une alerte sérieuse ? [...] »

« [...] Comme dans les procès intentés aux artistes pour "pornographie", souvent, les accusateurs savent que leur dossier est pratiquement vide et qu’ils n’obtiendront pas gain de cause, mais leur tentative de censure sert à intimider ceux qui n’adhèrent pas à leur système de pensée et à dissuader les autres de s’exprimer. Car, on le sait, la qualification d’antisémitisme ou de diffamation raciale conduit à une exclusion sociale dont les intellectuels qui en sont accusés injustement, comme Edgar Morin ou Hannah Arendt, ont toutes les peines à se remettre. » 

« Dans toute son œuvre, et surtout dans Chien blanc, [Romain] Gary exprime sa méfiance, voire son mépris pour certains professionnels de l’antiracisme qui "cachent en eux une faille paranoïaque [et] se servent ainsi des persécutés authentiques pour se retourner contre les "ennemis"." [...] »

« [...] Le paradoxe – et le danger – de [cette] "affaire" [Siné], c’est que les invectives qu’elle a soulevées et la véhémence des réactions suscitées semblent si disproportionnées en comparaison du texte incriminé qu’elles risquent de créer dans l’opinion une réaction inverse à celle espérée. »

    

   

BHL2_100

 

    
Mise à jour 04/08/2008

 

leplanb3Affaire Charlie Hebdo : la pétition à laquelle vous avez échappé ("Le Plan B")

    

   

BHL_120

    

     

***

   

Sur l'antisémitisme, pour se remettre le jugement en place :

Céline - Sartre - Apostrophes 1-2

C'est long mais intéressant, certaines choses d'ailleurs ne pourraient peut-être pas être dites si "librement" et avec l'esprit si dégagé, à l'heure actuelle. On sent qu'à l'époque "l'inquisition askolovichienne" ne sévissait pas encore, il y a même quelque chose d'assez saisissant dans ce contraste. Et ce n'était qu'Apostrophes, pas Droit de réponse...

 

Parole de Sartre rapportée par un des invités d'Apostrophes :

« l'antisémitisme ce n'est pas une doctrine, ce n'est pas un sentiment : c'est une passion »

 

Chose étonnante : sous ce rapport de la "passion" (prise comme productrice de délire irrationnel), on pourrait presque voir une sorte de "transfert", de l'antisémitisme (irrationnel et délirant par nature) vers l'"anti-antisémitisme" hystérique et inquisiteur de certains à l'heure actuelle.

   

   

bhl_url_120

   

  

Mise à jour février 2009

 

Siné relaxé des poursuites pour incitation à la haine raciale ("LibéLyon)

« [...] les juges s'appuient sur le témoignage d'une linguiste qui avait décortiqué la chronique de Siné, et conclu à "l'inconsistance du grief antisémite" »

   

  

BHL_120

  

   

Mise à jour décembre 2010

 

Charlie Hebdo (et Val) condamnés pour rupture abusive du contrat de Siné (Le blog de Gérard Filoche)

« Tous, absolument tous les juristes répètent qu’il n’y a pas d’antisémitisme dans le texte incriminé de Siné »

« Les éditions rotatives sont donc condamnées à verser 40 000 euros de dommages et intérêts au dessinateur et à publier en Une du journal sur un bandeau de 15 cm le communiqué judiciaire suivant [...] »

 

Charlie Hebdo condamné dans l'affaire Siné, Val désavoué (Rue89)

 

Charlie Hebdo condamné dans l’affaire Siné : « Tout le monde en parle » ? (Acrimed) 

« Philippe Val va-t-il, comme il l’avait exigé de Siné, présenter des excuses publiques dans Charlie Hebdo ? Ou alors, sur France Inter, comme lorsqu’il s’était invité à l’antenne pour justifier les renvois de Stéphane Guillon et Didier Porte ? BHL va-t-il écrire une tribune enflammée dans laquelle il reconnaît s’être trompé ? Laurent Joffrin va-t-il consacrer une page « Rebonds » de Libération à démentir ce qu’il avait écrit dans ces mêmes pages au moment de « l’affaire » ? Que vont faire Alexandre Adler, Claude Askolovitch, et tant d’autres ? »

  

  

BHL2_100

    

  

Mise à jour mars 2011

 

Etude de fond sur le sujet précis du présent billet, signée Alain Badiou et Eric Hazan : L'antisémitisme partout.

badiou_hazan

 

se trouve notamment confirmée l'imposture de BHL invoquant la préface de Sartre aux Damnés de la terre :

« Comme souvent chez cet auteur, [...] la référence est falsifiée : il n'y a rigoureusement rien, dans le Sartre auquel Bernard-Henri Lévy renvoie, qui ait un quelconque rapport avec ce qu'il lui fait dire. » (p. 26)

 

A écouter :

L’antisémitisme partout par Alain Badiou & Éric Hazan ("Là-bas si j'y suis" - France Inter) - audio
  

  

******

A lire aussi :

L'affaire Siné (Nouvel Obs)

Salir Badiou (Sébastien Fontenelle - Vive le feu!)

BHL : les dessous d'un système (Lire)

L’affaire Siné, par Bernard Langlois (Politis)

Siné qua non (Paul Moreira)

Philippe Val, à son propre jeu… (Sébastien Fontenelle - Bakchich)

Dossier — L’imposture Bernard-Henri Lévy (Le Monde Diplomatique)

Les « nouveaux philosophes », par Gilles Deleuze (juin 1977)

Bernard-Henri Lévy ou l’arbre qui cache la forêt (Romain Pigenel - LePost)

Publicité
Publicité
Commentaires
F
je n'ai pas en tête la référence de ce vieux texte(poésie?...) allemand où les habitants d'un village envahi par les rats font appel à un joueur de (disons) flûte capable d'entraîner par son jeu musical les rats hors du village et de provoquer leur noyade dans un proche marécage. Mais les habitants n'honorent pas leur contrat, et refusent de rémunérer le musicien magicien. Celui-ci entraîne alors, toujours par sa musique, les enfants vers la noyade dans le marais.<br /> Ceci autorise une autre façon de penser "l'homme aux rats".
Répondre
A
Donc on peut faire des caricatures du Prophète et railler l'Islam et ses croyants mais on ne peut faire la même chose quand il s'agit de juifs?<br /> De qui smoke t'on?
Répondre
A
@ BHLophobe<br /> "il s'agit d'une interprétation extrêmement "libre""<br /> <br /> C'est le moins que l'on puisse dire !<br /> BHL disait :<br /> <br /> « le Sartre de la préface aux Damnés de la terre avait pourtant démontré, sans appel, [que ces métaphores zoologiques] sont toujours la marque du fascisme »<br /> <br /> Non seulement il n'est pas question de ça chez Sartre, mais en plus BHL écrit "démontré sans appel" ! C'est fou quand même.<br /> En fait dans la préface c'est LUI Sartre qui fait des "métaphores zoologiques" ! (à propos de l'esclavage)
Répondre
B
Voici probablement le passage de Sartre visé par BHL. Comme on le verra il s'agit d'une interprétation extrêmement "libre". En effet Sartre ne parle pas ici de fascisme mais de colonialisme. Et puis surtout il parle d'une déshumanisation pratique et de l'idéologie qui l'accompagne. A aucun moment il n'évoque le lexique ou le vocabulaire. Mais BHL a une grande imagination (ce qui ne l'empêcherait pas d'avoir un zéro pointé pour contresens s'il devait repasser son agreg avec ce texte...) : "Avec le travail forcé, c'est tout le contraire : pas de contrat ; en plus de ça, il faut intimider ; donc l'oppression se montre. Nos soldats, outre-mer, repoussant l'universalisme métropolitain, appliquent au genre humain le numerus clausus : puisque nul ne peut sans crime dépouiller son semblable, l'asservir ou le tuer, ils posent en principe que le colonisé n'est pas le semblable de l'homme. Notre force de frappe a reçu mission de changer cette abstraite certitude en réalité : ordre est donné de ravaler les habitants du territoire annexé au niveau du singe supérieur pour justifier le colon de les traiter en bêtes de somme. La violence coloniale ne se donne pas seulement le but de tenir en respect ces hommes asservis, elle cherche à les déshumaniser. Rien ne sera ménagé pour liquider leurs traditions, pour substituer nos langues aux leurs, pour détruire leur culture sans leur donner la nôtre ; on les abrutira de fatigue. Dénourris, malades, s'ils résistent encore la peur terminera le job : on braque sur le paysan des fusils ; viennent des civils qui s'installent sur sa terre et le contraignent par la cravache à la cultiver pour eux. S'il résiste, les soldats tirent, c'est un homme mort ; s'il cède, il se dégrade, ce n'est plus un homme ; la honte et la crainte vont fissurer son caractère, désintégrer sa personne. L'affaire est menée tambour battant, par des experts : ce n'est pas d'aujourd'hui que datent les “ services psychologiques ”. Ni le lavage de cerveau. Et pourtant, malgré tant d'efforts, le but n'est atteint nulle part : au Congo, où l'on coupait les mains des nègres, pas plus qu'en Angola où, tout récemment, on trouait les lèvres des mécontents pour les fermer par des cadenas. Et je ne prétends pas qu'il soit impossible de changer un homme en bête : je dis qu'on n'y parvient pas sans l'affaiblir considérablement ; les coups ne suffisent jamais, il faut forcer sur la dénutrition. C'est l'ennui, avec la servitude : quand on domestique un membre de notre espèce, on diminue son rendement et, si peu qu'on lui donne, un homme de basse-cour finit par coûter plus qu'il ne rapporte. Par cette raison les colons sont obligés d'arrêter le dressage à la mi- temps : le résultat, ni homme ni bête, c'est l'indigène. Battu, sous-alimenté, malade, apeuré, mais jusqu'à un certain point seulement, il a, jaune, noir ou blanc, toujours les mêmes traits de caractère : c'est un paresseux, sournois et voleur, qui vit de rien et ne connaît que la force. "
Répondre
Z
Peut-on être "de gauche" et défendre le principe même du sionisme ? C’est une question qui mérite d’être posée. Le concept "d’Etat juif", avec ce que ça induit, peut-il être soluble dans les idéaux de gauche ?<br /> <br /> Le sionisme est un projet de conquête d’un territoire par et pour les juifs. Pourquoi pas ? L’Histoire du monde n’est qu’une suite de conquêtes. Seulement, quand on se lance dans une entreprise de conquête, ça entraîne des choses pas forcément jolies : Déplacement des populations "indigènes", répression, ségrégation, apartheid, etc... Et automatiquement en retour, révoltes, terrorisme, extrémisme, bref, réaction normale d’un peuple face à cette conquête... C’est ça aussi, l’Histoire de la création d’Israël. On peut défendre cette vision du monde, du Peuple juif, de ce droit à la conquête d’une Terre par les moyens qui s’imposent.<br /> <br /> Mais peut-on s’appuyer sur des valeurs de gauche pour ce faire ? Et surtout exiger que ces valeurs de gauche soient une caution morale à un projet nationaliste et coloniale ?<br /> <br /> Bien sûr, on parle souvent de "sionisme de gauche", mais je ferais remarquer qu’il y a eu jadis en France, un colonialisme de gauche. Qui accepterait aujourd’hui que des idéaux de gauche servent de caution à des thèses coloniales ?<br /> <br /> Israël reste un Etat qui pour exister en tant qu’"Etat juif", doit se fonder sur des piliers qui sont l’appartenance religieuse et l’appartenance raciale, ciment d’un sentiment nationaliste israélien. Qu’on le veuille ou non, ce genre d’identifications, de principes, mettant en avant l’appartenance religieuse et ethnique pour jouir de plein droit de votre citoyenneté, en France, vous classe immédiatement à l’extrême-droite de l’échiquier politique.<br /> <br /> Ainsi, le nationalisme et le "jus sanguinis" serait un mal à combattre quand il s’agit de la France et de Le Pen, mais serait défendable, voir justifiable, s’il est question d’Israël et de Olmert ?<br /> <br /> C’est pourquoi selon moi un homme de gauche ne peut entrevoir qu’une seule issue "de gauche" au conflit israélo-palestinien : la restauration de la Palestine historique dans un Etat unique, multi-confessionnel, dans lequel juifs et arabes, musulmans et chrétiens, auraient les mêmes droits, les mêmes devoirs, et dans lequel l’appartenance ethnico-religieuse ne serait pas déterminante...<br /> <br /> Vision totalement utopique, j’en conviens, tant on imagine mal le Hamas et le Likoud se mettre autour d’une même table pour parler d’une Palestine multi-ethnique et multi-confessionnelle. Mais le fait est que c’est le seul point de vue authentiquement de gauche quand au réglement de ce conflit.<br /> <br /> Alors on peut dire, si l’on y croit encore, que la solution de 2 Etats est la seule crédible, réaliste, mais qu’elle soit indépassable et non-critiquable dans le fond pour un homme de gauche, c’est plus discutable...
Répondre
Publicité
Archives
Derniers commentaires
Publicité